TPE de moins de 5 salariés : quelles sont les conditions pour faire jouer votre droit de rétractation ?
Fiche pratique | Publié le 02 juillet 2024 | Mis à jour le 05 juillet 2024
Le droit de rétraction qui permet aux consommateurs d’annuler certains contrats dans un délai de 14 jours a été étendu aux très petites entreprises (TPE) de moins de 5 salariés, dans des conditions précises. Une protection précieuse pour certains entrepreneurs individuels, professionnels libéraux, TPE qui souscrivent des contrats (notamment liés à des prestations numériques) sans toujours disposer de l’expertise nécessaire.
La loi encadre les relations commerciales, quelles qu’elles soient, afin de protéger les acteurs du monde l’entreprise et éviter les risques d’abus, tant du côté des clients que du côté des prestataires de biens et services.
Qu’est-ce que le droit de rétractation et dans quels cas certains professionnels peuvent en bénéficier ?
Un droit pour protéger les consommateurs
Pour protéger les consommateurs, la loi prévoit un droit de rétractation qui leur donne la faculté d’annuler, dans un délai de 14 jours, un contrat conclu :
- « à distance », par internet ou par téléphone ;
- ou « hors établissement », c’est-à-dire à la suite d’un démarchage réalisé en dehors de l’établissement commercial du vendeur.
Une protection étendue sous conditions à certains professionnels
La Loi Hamon du 17 mars 2014 a étendu ce droit de rétractation à certains « petits professionnels » (entrepreneurs individuels, professionnels libéraux, TPE…) à travers l’article L.221-3 du Code de la consommation, dans des conditions précises.
Ce droit de rétractation leur permet d’éviter le risque de se retrouver engagés contractuellement à la suite d’une mauvaise compréhension du contrat qu’ils ont conclu. Le législateur considère en effet, dans certains cas, que les très petites entreprises, comme les consommateurs, peuvent s'engager contractuellement sans bien comprendre tous les aspects du contrat.
Ce droit de rétractation n’est applicable que lorsque trois conditions strictes sont respectées :
- L’entreprise doit employer au maximum 5 salariés ;
- Le contrat doit être conclu « hors établissement » (démarchage par un vendeur en dehors de son établissement commercial) ;
- L’objet du contrat ne doit pas entrer dans « le champ d’application de l’activité principale » du professionnel (voir ci-dessous).
En dehors de ces conditions, ces « petits professionnels » ne bénéficient pas de droit de rétractation. Le professionnel ne bénéficie pas de droit de rétractation s’il a conclu un contrat par internet ou par téléphone.
Pour certains types de contrats, ils peuvent ainsi s’exposer à des frais en cas de résiliation anticipée de leur contrat. Ces frais peuvent parfois s’élever à plusieurs dizaines de milliers d’euros.
Quels sont les types de prestations qui entrent dans le champ d’application du droit de rétraction ?
Le droit de rétractation ne s'applique qu'aux contrats exclus de l’activité principale de l'entreprise
Le droit de rétractation ne peut jouer que si l’objet du contrat ne rentre pas dans le champ d’application de l’activité principale de l'entreprise. Ainsi, les achats auprès d'un fournisseur de produits et services liés à son activité principale ne peuvent bénéficier du droit de rétractation. En revanche, les prestations pour lesquels le professionnel ne dispose d'aucune compétence spécifique attendue peuvent bénéficier de cette protection.
Le droit de retractactation appliqué aux prestations numériques
Les prestations numériques peuvent être, dans certains cas, considérées comme étant en dehors du champ d’activité principale de l’entreprise cliente. Ainsi, un professionnel du BTP, par exemple, n’est pas censé être un expert du numérique, et avoir des connaissances sur les sites internet ou les réseaux sociaux. Ce type de prestation sort clairement de son activité principale.
La situation est appréciée au cas par cas par le juge. Il a par exemple jugé il y a quelques années que, pour un architecte, souscrire à un contrat de création et de licence d’exploitation d’un site Internet dédié à la promotion de son activité auprès de sa clientèle ainsi que la réalisation de prestations accessoires n’était pas dans le champ de son activité principale.
Idem pour une entreprise de production et de fourniture de bois de chauffage qui a signé un ordre d’insertion publicitaire dans un annuaire local.
En revanche, si vous vous lancez dans la vente en ligne, le contrat de prestations de services portant sur le site de vente en ligne entre en principe dans le champ de votre activité principale.
Les exceptions au droit de rétractation
La loi prévoit des exceptions au droit de rétractation (article L.221-28 du Code de la consommation) :
- biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés ;
- ventes de biens périssables ;
- prestations de services d’hébergement (autres que des services d’hébergement résidentiel) ;
- prestations de transport de biens et de locations de voitures ;
- prestations de restauration ou d’activités de loisirs devant être fournis à une date ou selon une périodicité déterminée.
Quels sont les délais de rétractation pour les biens et services achetés « hors établissement » ?
Si elle remplit les conditions prévues par la loi, l'entreprise dispose d'un délai de 14 jours pour se rétracter du contrat qu'elle a souscrit. Ce délai court :
- à compter de la conclusion du contrat pour les prestations de service ;
- à compter de la réception du bien en cas de vente de biens. Dans ce cas le client est dans l’obligation, pour que sa demande de remboursement soit recevable, de renvoyer le ou les produits commandés dans le délai imparti.
Préalablement à la conclusion du contrat, le vendeur fournit au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les conditions, le délai et les modalités d'exercice du droit de rétractation. Ces informations figurent sur le contrat signé (dans les conditions particulières de vente), mais aussi sur papier ou, sous réserve de l'accord du consommateur, sur un autre support durable.
Important : si ces informations n’ont pas été communiquées ou fournies de manière claire et compréhensible, le délai de 14 jours passe à 12 mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial.
En revanche si le professionnel informe le consommateur pendant la prolongation, le délai de rétractation expire après un délai de 14 jours à compter de la réception des informations.
Par ailleurs, les clauses qui font renoncer au droit de rétractation, y compris du professionnel, sont considérées comme nulles.
Pour plus d'informations sur ces points, vous pouvez consulter les articles R 221 - 3, L 221 - 5, L 221 - 8 et L 221 - 9 du Code de la consommation.
Comment exercer son droit de résiliation en tant que professionnel ?
Le professionnel exerce son droit de rétractation en informant le vendeur de sa décision de se rétracter par l'envoi, avant l'expiration du délai de 14 jours, d’un formulaire de rétractation ou de toute autre déclaration, dénuée d'ambiguïté, exprimant sa volonté de se rétracter. Il n’a pas à motiver sa décision.
Le vendeur peut également permettre au professionnel de remplir et de transmettre en ligne, sur son site internet, ce formulaire ou cette déclaration.
La charge de la preuve de l'exercice du droit de rétractation pesant sur le professionnel, il est recommandé de garder un accusé de réception si l’envoi a été fait par voie postale.
S’il a été fait sur le site internet du vendeur, ce dernier est tenu de communiquer sans délai un accusé de réception de la rétractation sur un support durable.
Pour plus d'informations sur ces points, vous pouvez consulter les articles L 221 - 18, L 221 - 21, L 221 - 22 et L 221 - 23 du Code de la consommation.
Les voies de recours si le vendeur avec qui vous avez contracté refuse de vous rembourser
Si le professionnel refuse de vous rembourser, vous pouvez commencer par lui envoyer un courrier de mise en demeure.
Si cela ne fonctionne pas vous pouvez solliciter :
- Le Médiateur des entreprises, service national placé auprès du ministre de l'Économie, chargé d'aider les entreprises qui rencontrent des difficultés dans leurs relations commerciales avec un partenaire (client, fournisseur) ;
- Votre syndicat professionnel (CPME, Medef, U2P, etc.) généralement très actif et efficace sur ces sujets ;
- Le tribunal judiciaire si vous ne parvenez pas à obtenir gain de cause, afin d'obtenir justice.
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Julien Karachehayas | Licence etalab-2.0